Le commode bouc émissaire (sur les parents de joueurs et le projet Mbappe)

Ulysse et les sirènes – John William Waterhouse

13 avril 2022, le club francilien de l’ACBB, l’un des plus réputé de la région parisienne, décide de suspendre la totalité de ses entraînements pour marquer le coup face à la recrudescence des comportements problématiques de parents de joueurs. 5 février 2024, le club héraultais de Castelnau Le Crès, là encore l’un des plus réputés de l’Occitanie, publie un communiqué cinglant expliquant que face à la croissance des incivilités à l’encontre des éducateurs, le club prend la décision d’exclure tout joueur dont le parent insulterait ou menacerait l’encadrement. 

Entre ces deux dates, c’est une véritable litanie d’évènements impliquant parents ou proches de joueurs et éducateurs qui se produit. Insultes, menaces, agressions physiques parfois, tout ou presque y passe et les parents sont prestement désignés comme seuls et uniques coupables de cet environnement délétère dans lequel se retrouve baigné le foot amateur. Les fameux projets Mbappe fleurissent partout en France ou en Navarre et, à l’image d’une société de plus en plus fracturée, ceux-ci ont pour conséquence de générer tensions et violences. Pour autant, les parents sont-ils les seuls à incriminer ? N’est-ce pas là agir de la même manière que Ponce Pilate et se laver les mains d’un écosystème globalement devenu fou ? 

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Nauséabondes complicités (à propos des incidents de Nice-OM)

Le serment des Horaces – Jacques-Louis David

Dimanche soir, aux alentours de 22h15, Dimitri Payet se présente au poteau de corner gauche situé devant le virage Sud de l’Allianz Riviera, la tribune occupée par les Ultras Populaire Sud, le principal groupe de supporters de l’OGC Nice. Comme depuis le début du match et quelques instants auparavant sur un corner précédent, des projectiles – principalement des bouteilles pleines – se mettent à pleuvoir à destination du joueur marseillais. L’une d’elles le touche violemment et le fait s’écrouler par terre, ce qui n’empêche pas les projectiles de continuer à lui arriver dessus. La suite est désormais tristement devenu mondialement célèbre, le numéro 10 olympien se relève, renvoie deux bouteilles dans le virage et le terrain est envahi par plusieurs dizaines de supporters niçois prêts à en découdre.

Mercredi soir, les deux clubs étaient convoqués devant la commission de discipline de la LFP et, sans grande surprise, celle-ci a fait le choix de prononcer un huis-clos d’un match pour le stade niçois puis de mettre en instruction le dossier. Nous ne connaîtrons donc que dans une dizaine de jours le résultat du match ainsi que les sanctions prononcées à l’égard des différents acteurs de ce qu’il s’est passé. En attendant, il est déjà possible de sortir du cadre du football et de tenter d’expliquer à quel point cette triste soirée d’août restera assurément dans les annales comme l’une de celles où le football aura illustré un grand nombre des maux de notre société actuelle : gestion désastreuse des autorités, police complice, impunité quasi-totale à l’égard de l’extrême-droite, mépris souverain de l’éthique la plus élémentaire, etc. En d’autres termes, dimanche encore plus que d’habitude, le football a été éminemment politique. C’est donc bien sur ce terrain qu’il faut porter le principal combat.

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Superleague : Refuser leur renoncement, exiger la révolution

Manifestation sous l’Occupation – Valias Semertzidis

Le football Français puis Européen a été saisi par plusieurs secousses ces dernières semaines. Tout d’abord une sortie de Pablo Longoria sur la formation des joueurs et le modèle de jeu proposé par les entraineurs français. Puis c’est toute l’Europe qui a été saisie par les volontés séparatistes de certains riches clubs du vieux continent. Ces petites secousses, auraient pu permettre d’amorcer une vraie réflexion de fond, mais on est resté en surface avec des postures caricaturales. Réflexion autour de ces dynamiques.

Le football professionnel européen est saisi de plusieurs dynamiques, mais finalement, c’est un ensemble de clubs très riches qui veulent rester très riches et étendre leur privilège. À l’intérieur, des chaines payantes encouragent ou soutiennent tout ça, des agents ou intermédiaires se gavent et des gens veulent préserver une hypothétique identité du football ou des clubs. En France, c’est une corporation d’anciens joueurs, de vieux dirigeants qui ont surfé et profité de l’argent massif dans le football et qui ne veulent pas laisser leur place ou se remettre en question. Nous, supporters, des fois spectateurs, quelques fois même consommateurs sommes à la marge, peu considérés et surtout rarement écoutés. Pourtant, il est possible de profiter de ce moment de tension pour faire émerger un autre projet pour le football.

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Racisme dans le football : l’impasse ?

La Parabole des aveugles – Pieter Brueghel l’Ancien

C’est un des nombreux maux qui gangrènent notre société et logiquement le football : le racisme. La lutte contre ces actes révoltant n’est pas une chose aisée, loin de là. Pourtant au fil du temps, les instances du football ont pris le problème à bras le corps, en tous cas en apparence, des campagnes d’affichage, des badges ou simplement une volonté de libérer la parole des différents acteurs. Mais en 2021, cette lutte semble être dans une impasse. Réflexions et perspectives, pour sortir toujours plus de ce sentiment d’impuissance.

De plus en plus souvent, les joueurs ont compris qu’ils ne devaient plus faire confiance aux instances et qu’ils devaient agir par eux-mêmes. C’est pour cela que certaines équipes se mettent à rejoindre les vestiaires quand en plein match, un acte raciste est entendu. C’est ce qui est arrivé lors du match Cadiz-Valence comptant pour les 29e journées de Liga. Peu avant la demi-heure de jeu, Diakhaby explose, il est en rage et semble vouloir s’expliquer avec Juan Cala. Tout s’emballe, après une discussion entre Gabriel, le capitaine des Blanquinegro et le défenseur français, les joueurs de Valence décident de rejoindre les vestiaires. On se rend rapidement compte que c’est pour protester contre un acte raciste.

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Les liaisons dangereuses (à propos des rachats de clubs)

Télémaque et les nymphes de Calypso – Angelica Kauffmann

Depuis quelques semaines, voire mois, le serpent de mer de la #VenteOM revient régulièrement sur le devant de la scène. Sur les réseaux sociaux bien entendu mais également dans les médias puisqu’un certain nombre d’articles ou d’interviews à ce propos ont vu le jour ces derniers temps. S’il ne m’appartient pas ici de parler de ce sujet propre – pour la simple et bonne raison que je n’ai absolument aucune information à ce propos – les réactions aux rumeurs de vente paraissent être une très bonne porte d’entrée pour s’intéresser aux rachats de clubs et aux débats qui leur sont afférents.

Le point commun des différentes rumeurs de vente du club est effectivement qu’elles placent toutes l’acheteur potentiel dans le pourtour arabo-musulman. La plus relayée d’entre elles évoque l’intérêt du prince Al-Walid ben Talal Al Saoud ce qui n’a pas manqué de provoquer des réactions goguenardes, consternées ou exaltées selon les personnes. Les critiques parfois très puissantes à l’égard d’un potentiel rachat par ce personnage semblent être révélatrices de bien des biais qui parcourent les commentaires dès lors que l’on aborde la question des rachats de clubs.

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Parlons un peu de la FIFA

La lecture du manifeste du 19 février 1861 – Grigori Miassoïedov

La FIFA est une association à but non lucratif qui brasse pourtant des milliards de dollars et qui a un wagon de partenaires économiques. Tous les 4 ans, elle pose ses valises dans un pays avec sa caravane publicitaire et impose sa loi, sans ménagement. Le mondial lui appartient, elle en fait ce qu’elle en veut et peut donc le caler en hiver dans un pays qui pratique l’esclavage moderne. 2022 doit marquer un changement de cap et sonner le glas de l’impunité.

C’est la maraude qui traverse de nombreux observateurs européens du football : la coupe du monde au Qatar est un problème. Ce mondial symbolise trop de chose, la corruption, des investissements massifs dans des équipements qui n’ont aucun avenir, surtout des conditions de travail souvent exécrables sur les chantiers et la mort de nombreux ouvriers. Concernant ce petit pays du Golfe, c’est surtout le dernier critère qui hérisse le poil de beaucoup de monde. La presse anglophone martèle le chiffre de plus de 6000 morts sur les chantiers des stades, quand en France on parle d’une moyenne de 1000 morts par an sur ces mêmes chantiers. À la fin, la FIFA est-elle complice ou victime de tout ça ?

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Penser un football émancipateur

Soviet Sport, 1935 – Alexander Samokhvalov

Le football est un fait social total comme l’entend Durkheim. Il marque la société, ses acteurs, son environnement, il offre une multitude de grilles de lecture et est présent dans la vie de beaucoup, même ceux pour qui ce sport n’a que peu d’intérêt. Cependant, on aime réduire le football à son aspect économique, ou alors comme l’opium du peuple, un sport qui aliène les masses et empêche leur émancipation en faisant ressurgir le plus mauvais en eux. Pour autant, le football est encore là, à irriguer nos vies, occuper nos soirées, nos journées, on aime autant aller au stade que taper dans le ballon avec ses potes, dans un parc, sur un vieux City stade ou un terrain plus classique. Le Football fait partie de nos vies, et ce pour encore un certain temps, alors comment le penser comme un élément de notre émancipation, peut-il être la porte vers un nouvel horizon ?

Il faut tout d’abord tordre le cou à un abus de langage, le football qui fait la une des médias, fait sensation à chaque frasque ou presque n’est qu’une infime partout du Football dans sa globalité. Taper dans un ballon, c’est avant tout un sport accessible à tous ou presque qui plait et passionne de nombreuses personnes et qui est devenu un langage planétaire. Bien sûr, le football professionnel, celui qui brasse des millions de dollars est une émanation directe de ce sport qui touche autant de personnes. Sans cet engouement planétaire, jamais de mondial diffusé dans presque tous les pays et jamais de FIFA avec plus de pays affiliés qu’à l’ONU. Cependant, le football ce n’est pas que les championnats nationaux, les compétitions continentales ou internationales ou encore les indemnités de transferts délirantes et c’est important de le rappeler.

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Demain, c’est loin

David avec la tête de Goliath – Le Caravage

Vendredi dernier, peu avant 21h c’est par un communiqué relativement succinct que Frank McCourt a annoncé le changement de direction à la tête de l’OM. Moins d’un mois après les événements survenus à la Commanderie et quelques jours avant l’arrivée de Jorge Sampaoli sur le banc du club, Jacques-Henri Eyraud, sans doute le fusible le plus important du propriétaire étatsunien, a donc quitté ses fonctions de président délégué pour rejoindre le conseil de surveillance. Dans la foulée, McCourt s’est rendu à Marseille pour introniser Pablo Longoria comme nouveau président et faire le tour des médias et des huiles politiques de la ville dans une forme de numéro de charme qui n’est pas sans rappeler 2016 et les premiers pas du Bostonien à Marseille.

Présenté comme l’ennemi numéro un d’un grand nombre de supporters, honni par les groupes ultras qu’il avait mis en demeure avec son sbire Hugues Ouvrard, pompier pyromane durant tout le mois de février, Jacques-Henri Eyraud semble donc avoir perdu son bras de fer avec les supporters – et non pas les « fans » selon son jargonneux et pompeux verbiage – alors même que cela semblait bien peu probable il y a quelques jours encore. Faut-il dès lors y voir une victoire totale de la part des supporters et plus particulièrement des groupes ? Le retrait de la mise en demeure annoncé par le propriétaire pourrait aller dans ce sens. Je crois, toutefois, qu’il faut se garder de tout triomphalisme tant la situation demeure précaire et la bataille risque d’être longue.

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Youpi ! Canal + sauve son système et après ?

Le soulèvement – Honoré Daumier

Après une semaine encore riche en émotion, Canal + a annoncé avoir signé un accord après des négociations de gré à gré avec la LFP pour diffuser la fin de saison de la L1. Ce choix a été salué par la critique, permettant à la chaine cryptée de faire un coup de maitre en diffusant à moindre coup un produit phare de sa grille et à la LFP de faire rentrer de l’argent dans la caisse des clubs. Cependant, suffisant pour permettre la permanence du système en place ? Rien n’est moins sûr.

Par un tweet assez classique, Maxime Saada, le PDG ou CEO pour les anglophones (ou les bandeurs du libéralisme) de C+ officialisait le retour de la L1 « à la maison ». Exclu du dernier appel d’offre qui avait vu Mediapro faire péter les revenus, hypothétiques, Canal était passé par la petite porte pour pouvoir diffuser quelques matchs de L1 via la location du fameux lot 3 remporté par BeIN sport. Après de longs mois à attaquer la LFP, le prix trop cher de ces droits et prévoir la chute de Mediapro, C+ est revenu dans la danse pour sauver le football français après l’avoir fait grandir, cependant, peut-on être satisfait ?

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OM : Supporters, seulement fautifs ou complices ?

Grève à Saint Ouen – Paul Louis Delance

Samedi alors que le ciel est menaçant sur Marseille, la rumeur qui commençait à prendre de l’importance, au point que l’Equipe en parle, devient réalité. Un groupe, difficilement identifiable, de plusieurs centaines de personnes se retrouve sur le chemin sinueux qui mène à la Commanderie. La manifestation pour protester contre la politique de JHE et de McCourt est la suite logique d’une campagne d’affichage de banderoles hostiles aux deux dirigeants dans la ville. Cette fois, l’idée est de montrer physiquement le mécontentement. Depuis, les médias dominants ont fait leur choix, Jacques Henri Eyraud est monté sur ses ergots et ne fait qu’attiser le mécontentement. Retour sur une situation qui ne pouvait pas finir bien.

Le mécontentement n’est pas nouveau du côté de Marseille, les supporters et plus largement les groupes ultras ou non qui animent le Vélodrome et se déplacent un peu partout en France et en Europe pour pousser leur équipe en ont marre de la gestion et de l’attitude JHE. À l’image des Bukaneros, le président de l’OM comme celui du Rayo est grimé en Mickey Mouse. Le torchon brûle à Marseille, mais les tensions sont fortes ailleurs. Nantes ou encore Bordeaux récemment, les supporters ne sont plus aussi réceptifs qu’avant au discours de père Noël des propriétaires de club ou de leur marionnette. Les supporters marseillais ont décidé de passer à l’action. Quitte à mourir, autant le faire dignement.

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