Misère de la politique associative (à propos des associations et de la sous-traitance de la misère)

Une rue de Paris en mai 1871 – Maximilien Luce

Il y a quelques jours, nous avons vu circuler sur les réseaux sociaux les images de dizaines d’étudiants faisant la queue pour recevoir de l’aide alimentaire. Si le sort des étudiants est aujourd’hui plus particulièrement mis en avant tant leur détresse (psychologique, sociale, matérielle notamment) est parvenue à un stade avancé, c’est bien une part substantielle de la population qui se retrouve encore plus dans le dénuement du fait de la crise sanitaire consécutive à la pandémie de Covid-19. De Marseille, où les bénévoles de l’après-M distribuent des denrées alimentaires et tentent de permettre aux enfants de familles modestes de partir en vacances, à Grenoble, où les étudiants ont recours à l’aide alimentaire de manière soutenue, en passant par la Seine-Saint-Denis, c’est bien dans toute la France que la misère explose depuis bientôt une année. Explose, le mot est important. La crise sanitaire n’est effectivement pas venue bousculer une société où tout le monde mangeait à sa faim.

Le covid-19 et les politiques publiques mises en place depuis ont rendu encore plus dramatique une situation qui n’était déjà pas au beau fixe – il est important de conserver cela en tête pour se garder de la croyance selon laquelle, une fois le nouveau coronavirus jugulé, la vie reprendrait son cours dans le meilleur des mondes possibles. À la crise sanitaire déjà présente et à la crise sociale aggravée risque fort, sauf retournement de modèle hypothétique aujourd’hui, de succéder une crise économique qui fera encore grimper la misère (les PGE s’arrêteront, le report de la date de fin de droits des personnes en situation de chômage également pour ne citer que les éléments les plus tangibles) et de ce fait, les associations qui luttent contre la misère la plus crue seront certainement sollicitées comme jamais. Ces mêmes associations qui semblent être la roue de secours du capitalisme mais qui participent à sauver des vies, tel est leur fardeau.

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De quoi « les territoires perdus » sont-ils le nom ?

Lundi 7 mars, en rentrant du boulot j’ai eu le malheur d’allumer ma télé et de tomber sur une parodie de débat entre deux chroniqueurs sur I-Télé, deux chroniqueurs censés représenter les deux France : celle de l’accueil contre celle du repli. Ces deux chroniqueurs, ce sont Jean-Claude Dassier et Françoise Degois. Le débat portait sur la question des migrants et, très vite, celui-ci a découlé sur les conséquences de l’immigration sur notre société. Madame Degois, dans la posture caricaturale de l’angélisme a alors donné la réplique à Monsieur Dassier qui représentait l’autre France, celle de la fermeté et du repli.

Quand l’une affirme qu’il n’y a absolument aucun problème avec l’immigration l’autre rétorque qu’au contraire tous nos problèmes proviennent de l’immigration. Mépris des lois républicaines, haine contre la France et communautarisme sont les trois grands chiffons agités pour affoler la doxa. Ces deux positions, caricaturales et manichéennes ne reflètent pas vraiment la réalité de la situation dans les quartiers dits sensibles, là où la population immigrée ou descendant de l’immigration est concentrée. Demeurer dans ces postures éloignées de la réalité concrète et tangible est le meilleur moyen de ne rien régler aux problèmes et de faire du débat les nouveaux jeux du cirque. Lire la suite

L’humanitaire, nécessaire mais loin d’être suffisant

A la suite de la publication de la terrible photo d’Aylan Kurdi, ce petit enfant syrien échoué sur une plage turque, les ONG et les associations humanitaires ont reçu des dons massifs. Prenant conscience, à l’aide de cette photo, de la gravité de la situation, l’opinion publique européenne s’est ainsi emparée de la question en faisant parvenir des sommes d’argent rarement vues en aussi peu de temps. Beaucoup d’associations ont même parlé d’un mouvement de générosité sans précédent dans la mesure où beaucoup d’entre elles n’avaient jamais reçu autant de dons en si peu de temps.

Cet engouement massif pour les associations humanitaires est, certes, une bonne chose. Toutefois, il a aussi eu pour conséquence de mettre en évidence que, si les associations et ONG humanitaires sont nécessaires pour endiguer quelque peu le malheur du monde, se reposer simplement sur leurs actions est à la fois hypocrite et totalement illusoire. C’est ainsi que ces associations ressemblent à s’y méprendre aux palliatifs que l’on donne aux personnes en fin de vie : elles soulagent quelque peu le malheur du monde mais à elles seules, elles sont incapables de réellement endiguer celui-ci. Finalement, elles peuvent même apparaitre comme dangereuse dans la mesure où en déléguant l’action à ces structures, l’opinion publique se détache complètement des problèmes. Lire la suite