Depuis quelques années la question des politiques austéritaires s’est imposée comme l’un des débats centraux au sein de l’Union Européenne et plus précisément dans la zone euro. Espagne, Italie, Portugal, Grèce, Irlande, nombreux ont été les pays à avoir été contraints par la Troïka (BCE – Commission Européenne – FMI) à appliquer des politiques austéritaires en baissant drastiquement les dépenses publiques afin d’obtenir de nouveaux prêts de la part de telle ou telle institution financière.
Si les pays membres de l’Union Européenne n’ont commencé à faire l’expérience de l’austérité qu’à la suite des crises de 2007-2008 puis de la zone euro, d’autres pays dans le monde les ont subies depuis bien longtemps. Il serait en effet bien malhonnête de présenter l’arrivée des politiques austéritaires sur le continent européen comme une nouveauté dans le monde. Pour autant, il me semble bien que l’exemple grec en particulier permet d’illustrer à merveille tant les impasses que le caractère autoritaire de ces politiques scélérates qui n’ont finalement pas d’autre but que de spoiler les citoyens pour offrir les Etats aux puissances d’argent.
La fable du TINA
Au tournant des années 1980, Margaret Thatcher et Ronald Reagan sont les symboles du triomphe du néolibéralisme et de l’école de Chicago. Si le néolibéralisme entend mettre au pas l’Etat en calquant son fonctionnement sur celui des entreprises, il entend bien évidemment le réduire comme peau de chagrin selon le principe reganien voulant que l’Etat n’est pas la solution au problème mais lui-même le problème. Dans cette optique, l’austérité n’est pas une fin en soi mais simplement un moyen de faire maigrir l’Etat ainsi que l’entendent les néolibéraux, considérant qu’il faut réduire les dépenses publiques au plus bas possible.
A ce titre, le travail de sape de tous les laudateurs du néolibéralisme a été de présenter leur modèle comme étant le plus rationnel et raisonné des modèles. Alors même qu’il fait partie des plus idéologues des idéologies, le néolibéralisme a tout fait pour se présenter comme un modèle logique. Plus encore que tout cela, les défenseurs du néolibéralisme et donc de l’austérité n’ont de cesse d’expliquer qu’il s’agit de la seule politique possible ou viable pour mieux imposer leurs vues. C’est l’illustration du fameux « There is no alternative » thatchérien.
L’autoritarisme austéritaire
Le corollaire de cette croyance absolue en la pertinence de ce modèle est sans conteste sa propension à vouloir l’imposer envers et contre tout (et tous). Bien mis en avant par Naomi Klein dans la Stratégie du choc, la propension des capitalistes néolibéraux à user de la violence voire de la déportation n’est plus à prouver et il en va de même dès lors qu’il s’agit d’imposer des politiques austéritaires partout sur la planète. Récemment c’est la Grèce qui a vu sa souveraineté purement et simplement niée par ses bailleurs (le FMI en tête) au sein de l’Union Européenne mais cette stratégie s’est répétée à de nombreuses reprises pendant des décennies.
Dans cette entreprise de tissage de toile planétaire, les tenants du néolibéralisme austéritaire n’ont effectivement pas hésité à utiliser leur bras armé financier que représente le FMI pour mettre au pas l’ensemble ou presque des pays les plus dominés de la planète. Se présentant comme un généreux prêteur enclin à apporter des fonds aux pays que les marchés financiers ne daignent même pas regarder, le FMI a joué à plein régime le rôle de néocolon financier. L’apport financier et monétaire du FMI n’est effectivement jamais inconditionnel et toujours lié à la mise en place de ce qui est poliment appelé des plans d’ajustement structurel et qui ne sont en réalité que l’obligation pour les pays emprunteurs de passer sous les fourches caudines du néolibéralisme austéritaire. Pourquoi s’embêter à montrer son autoritarisme au grand jour quand on peut le faire via des institutions financières ? « Il y a deux manières de conquérir & asservir une nation. L’une est par l’épée. L’autre est par la dette » disait le deuxième président des Etats-Unis et il y a bien longtemps que les dominants ont rangé l’épée.
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