20 ans déjà. 20 ans déjà que 8 372 hommes et adolescents bosniaques ont été massacrés par des unités de l’Armée de la République serbe de Bosnie sous le commandement du général Ratko Mladić au simple motif qu’ils étaient musulmans. Plus de 50 ans après la deuxième Guerre mondiale, ses camps de concentration et sa solution finale, des hommes et des adolescents ont donc été massacrés en vertu d’une «épuration ethnique» menée par des milices serbes. Les Hommes seraient-ils à ce point inhumains pour ne pas apprendre de leur passé ? Il semblerait que oui, malheureusement.
20 ans déjà oui. Mais 20 ans à peine, aussi. C’est quoi 20 ans à l’échelle de l’Histoire ? Rien du tout. Une génération tout au plus. Tout ça pour dire que non, ce massacre n’est pas une péripétie lointaine. A l’heure où les partis d’extrême droite progressent partout en Europe, souvenons-nous de ce massacre motivé par des simples raisons ethniques. De Viktor Orban en Hongrie à Aube Dorée en Grèce, les arguments violents et ethniques sont encore présents en Europe. Si Srebrenica nous rappelle une chose, c’est que la paix est, comme la démocratie, quelque chose d’extrêmement fragile.
Le massacre de Srebrenica ou le retour de la barbarie sur le continent européen
La simple lecture de la description des exactions suffit à comprendre toute la violence et la haine des milices serbes : la plupart des hommes, des soldats mais aussi des vieillards et des adolescents, formèrent une colonne pour éviter les mines et tenter de rejoindre la ville bosniaque de Tuzla, située à cinquante kilomètres. Cette colonne que l’on estime à environ 12 500 le nombre de personnes fut rapidement encerclée par les forces serbes, qui ouvrirent le feu à l’aide de canons antiaériens et de mitrailleuses lourdes. Cette embuscade fit plusieurs centaines de tués, ainsi que de nombreux blessés. D’après Jean-René Ruez, Chef de l’Équipe Srebrenica du Tribunal Pénal International pour la Yougoslavie, ceux qui choisirent de se rendre furent regroupés en divers endroits, et des exécutions de masse furent perpétrées dans certains de ces lieux de regroupement. Les forces serbes continuèrent à poursuivre le reste du groupe, faisant des victimes jusqu’au territoire bosniaque. Des survivants accusent les serbes d’avoir utilisé des armes chimiques ou biologiques. Apparemment il s’agissait d’un gaz incapacitant composé de benzilate, qui désoriente ses victimes et leur donne des hallucinations.
Voilà l’Europe à nouveau face à des pratiques qu’elle pensait avoir banni de son continent. La Shoah nous éloignera de ces actes insensés disaient les Européens après la fin de la guerre. L’Union Européenne a été en partie construite pour instaurer la paix sur le continent. Et voilà que les Européens redécouvrent avec effroi que la barbarie n’a pas lieu qu’au Rwanda ou au Cambodge mais tout près d’eux, sur leur propre continent.
La lâcheté de l’ONU et de l’OTAN en partie responsable
Le plus grave dans ce massacre est que les populations bosniaques étaient censées être sous protection des casques bleus de l’ONU et des troupes de l’OTAN. Au moment de la prise d’assaut de la ville par les forces de Ratko Mladic, les Néerlandais de la FORPRONU demandent, en vain, une aide aérienne avant d’être pris en otages par les forces serbes. En somme l’ONU et l’OTAN ont regardé faire sans bouger le moindre petit doigt. De quoi illustrer à merveille la phrase d’Albert Einstein qui affirmait que «le monde ne [serait] pas détruit par les gens qui font le mal mais par ceux qui les regardent sans rien faire». Finalement, dans cette affaire ce qui fait le plus peur et le plus froid dans le dos n’est pas le bruit des bottes mais plutôt le silence des pantoufles des dirigeants de l’ONU et de l’OTAN qui ont laissé faire sans broncher.
Pour conclure ce billet bien plus chargé d’émotion que de raison, j’aimerai simplement nous appeler à être humain en ce jour de commémoration et à ne pas débattre sur « est-ce que c’est un génocide ou pas? » comme le font nombre de médias aujourd’hui. Le meurtre ne serait-ce que d’une seule personne pour ses convictions politiques, philosophiques et religieuses est absolument intolérable. Tâchons de nous remémorer ces massacres inhumains car comme l’a si bien exprimé Winston Churchill, un peuple qui oublie son passé se condamne à le revivre.