Depuis son arrivée au pouvoir il y a un peu moins d’un an, Emmanuel Macron a mené à toute vitesse une politique de classe sans vergogne. Profitant de la relative apathie des classes populaires et de la population en général après une campagne électorale marathon, il a pris le parti de mettre en place ce que bien des éditorialistes se plaisent à placer sous le vocable de Blietzkrieg, à savoir une guerre éclaire. Le rêve de l’oligarchie de Bercy se voit exaucé avec l’arrivée au pouvoir de l’un des leurs et la mise au pas du pays dans ce qui constitue assurément une stratégie du choc si chère à Naomi Klein. Le monarque présidentiel, profitant du pouvoir que lui confère les institutions de la Vème République, a clairement mis en place son storytelling, imposer un certain imaginaire qu’il a conçu pendant la campagne et gouverner au profit de la petite minorité de Français qui l’a porté au pouvoir. Il faut reconnaitre au successeur de François Hollande une certaine habileté politique dont on le pensait incapable au départ. Il faut dire que la comète Macron ne cesse de déjouer les pronostics depuis son entrée en campagne. Beaucoup de monde, moi y compris, considéraient que sa stratégie était vouée à l’échec. Monsieur Macron ne pouvait pas gagner l’élection présidentielle, il le fit. Monsieur Macron n’aurait pas de majorité à l’Assemblée nationale pour gouverner une fois élu, il l’obtint. Monsieur Macron ne parviendrait pas à faire passer les ordonnances démantelant le code du travail sans provoquer le blocage du pays, il réussit sans trop d’encombres à les faire adopter.
Voilà donc près d’un an que le locataire de l’Elysée affiche une insolente réussite. L’on pourrait, c’est assez aisé et confortable, se dire que ledit locataire ne profite que de sa bonne étoile, du fait que la vie politique française est un champ de ruines et que, finalement, ce n’est qu’un pur hasard que tout cela se produise. On peut aussi, c’est mon parti, dire qu’au contraire, Emmanuel Macron est la suite d’une logique qui nous gouverne depuis des décennies et qu’il est à la fois l’aboutissement et le climax de cette tendance, celle qui sous couvert de moderniser le pays le livre aux politiques néolibérales qui font exploser inégalités et pauvreté. Je crois également qu’il faut reconnaitre à Emmanuel Macron une qualité certaine dans la tentative d’imposer un imaginaire en même temps que de porter une attaque à la fois systémique et globale. Le moment Macron comme certains l’appellent – je lui préfère l’expression d’ère Macron, bien plus parlante à mes yeux – est peut-être, c’est ma conviction, l’enclenchement d’une forme de lutte finale. Le capital triomphant se sent désormais tout puissant dans ce pays pour attaquer le système social de ce pays hérité du CNR et qui fut l’occasion de le faire reculer. Après avoir avancé durant plus d’un demi-siècle, voilà ce capitalisme au faîte de sa puissance et prêt par le biais de Macron à tenter de s’imposer définitivement. Pour autant, cette ère Macron est également le moment où l’hybris de ce capitalisme qu’il représente est à son apogée. En cela, les événements actuels me semblent être une occasion pour cesser d’être dans une posture défensive et repasser à l’offensive vis-à-vis du capital. Lire la suite