
Allégorie de la Pologne vaincue (ou Le Prométhée polonais) – Horace Vernet
Il y a quelques jours, le gouvernement a présenté son plan de relance pour lutter contre les effets économiques et sociaux de la crise sanitaire que nous traversons. Avec les 100 milliards d’€ proposés, le pouvoir en place a expliqué qu’il soutenait ainsi l’économie et qu’il préservait le tissu social du pays, durement frappé par le confinement dont les répercussions risquent de se faire sentir encore longtemps. À l’annonce dudit plan, le MEDEF s’est, par la voix de son président, félicité d’avoir été entendu et affirmé en substance que ce plan correspondait presque en tous points à ce qu’il attendait. Sans surprise, l’exécutif poursuit la politique qu’il mène depuis son arrivée au pouvoir, à savoir une politique tournée vers les entreprises, une politique de l’offre.
Dès lors, le plan de relance apparait comme éminemment critiquable tant il semble n’être qu’un plan de financement des entreprises. Ce choix fait par le pouvoir en place ne doit guère étonner puisque des ordonnances sur le droit du travail à ce plan de relance en passant par toute une litanie de mesures prises entre temps, l’objectif n’a pas varié d’un pouce : donner toujours plus de pouvoir au patronat vis-à-vis des salariés. Cette politique de l’offre qui se poursuit au moment du plan de relance est pourtant loin d’avoir fait la preuve de son efficacité.
Le parti pris idéologique
Ce primat accordé aux entreprises – plus précisément à leur sphère dirigeante – n’étonne pas tant elle est l’une des matrices du néolibéralisme. La politique de l’offre entend répondre à ce qui apparait comme une évidence selon les néolibéraux à savoir le fait que ce seraient les entreprises qui créeraient l’emploi. Aussi s’efforcent-ils de mettre en place des mesures qui libéreraient les entreprises des contraintes qu’elles connaissent pour que celles-ci puissent embaucher. C’est tout l’objet des ordonnances sur le code du travail adoptées en début de quinquennat et qui postulent que pour qu’il y ait plus d’embauches il faut faciliter les licenciements.
Cette vision, contrairement à ce que prétendent ses laudateurs, est évidemment idéologique et affirme la primauté de l’entreprise et du patronat sur le salarié et le citoyen lambda. Soutenir les entreprises de manière aveugle – nous y reviendrons – aboutit finalement à leur accorder un blanc-seing pour agir comme bon leur semble. Les ordonnances sur le code du travail ont par exemple permis des ruptures conventionnelles collectives assez largement utilisées dans la période actuelle afin d’éviter que les départs ne soient considérés comme des licenciements. Dans le rapport de force entre les salariés et les patrons, mener une politique de l’offre revient, pour l’Etat, à se placer du côté de ces derniers.
La négation des faits (à propos du CICE)
Fortement liée au néolibéralisme, la politique de l’offre fonctionne de pair avec le new public management, cette théorie prétendant qu’il faudrait évaluer sans cesse les fonctionnaires et leur appliquer les méthodes du privé. Cette frénésie d’évaluation se garde pourtant d’analyser les effets des différentes mesures inspirées de cette politique de l’offre. Il s’agit, en somme, pour les tenants de ces théories de ne jamais évaluer ce qui pourrait démontrer l’inanité de leurs théories, une évaluation à géométrie variable en d’autres termes. Alors que les demandeurs d’emploi ou les bénéficiaires de minima sociaux sont sans cesse sollicités pour prouver qu’ils sont bien à la recherche d’un emploi, les milliards déversés sur les entreprises ne font l’objet d’aucune réelle évaluation susceptible de remettre en cause cette politique.
L’exemple récent du CICE est à cet égard particulièrement évocateur. Mis en place par François Hollande puis pérenniser par la suite avec la transformation du crédit d’impôt en baisse de cotisations permanente, la mesure est loin d’avoir atteint ses objectifs. De nombreuses entreprises ont effectivement empoché le magot sans conserver l’emploi comme elle s’y était engagée. Dès lors, cette négation des faits apparait bien plus comme une complicité que comme une négligence de la part des défenseurs de la politique de l’offre. En agissant de la sorte, ils s’assurent de mettre à mal le modèle social du pays tout en faisant des cadeaux aux dirigeants d’entreprises qui s’empressent de verser en dividendes l’argent reçu. Un vol d’argent public en bande organisée finalement.
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