La mondialisation en quelques lignes

S’il y a bien un élément qui est remis en cause par le surgissement du nouveau coronavirus et la crise sanitaire que nous traversons, c’est le concept de mondialisation. Un peu partout sur la planète, en effet, des voix s’élèvent pour appeler à une relocalisation des activités et à une démondialisation. En France, cela se matérialise assurément par le retour sur la scène médiatique d’Arnaud Montebourg, le chantre de cette idée depuis son passage au Ministère de l’Économie, du Redressement productif et du Numérique – l’on garde notamment en mémoire sa célèbre une avec une marinière pour promouvoir le « made in France ».

Avant de parler de démondialisation il faut, toutefois, selon moi commencer par définir ce que recouvre le processus de mondialisation, ce sans quoi nous avons toutes les chances de passer à côté du réel sujet. Si l’on en croit Wikipedia, le concept de mondialisation correspondrait « à la libre circulation des marchandises, des capitaux, des services, des personnes, des techniques et de l’information. Il désigne le processus d’intégration des marchés et de rapprochement des humains qui résulte notamment de la libéralisation des échanges, du développement des moyens de transport de personnes et de marchandises, et des retombées des technologies de l’information et de la communication à l’échelle planétaire. Elle se manifeste, outre l’interdépendance croissante des économies (mondialisation économique) et l’intensification de la concurrence, par l’expansion des échanges et des interactions humaines ». Je crois pourtant que cette définition occulte la partie centrale de la mondialisation néolibérale.

Dérégulation plus que mondialisation

Ce qui est frappant dans les débats qui entourent la notion de mondialisation néolibérale est assurément la volonté de ses laudateurs d’en faire la seule possible – ce constat n’est guère surprenant dans la mesure où la logique thatchérienne du TINA (There is no alternative) est l’un des principaux outils rhétoriques utilisés par ceux qui défendent ce modèle. La réalité est pourtant bien autre, les processus d’échanges entre les pays mondiaux ne sont pas nés au tournant des années 1980 ni même dans la foulée de la Deuxième guerre mondiale avec les accords du GATT comme l’on tente bien souvent de le faire croire.

Dès lors, quels objectifs poursuit cette tentative d’appropriation d’un tel concept ? Il me semble qu’agir de la sorte revient, pour ces personnes, à tenter de dissimuler la réalité de leur mondialisation, celle néolibérale qui est bien plus une grande dérégulation qu’autre chose. La poursuite effrénée du libre-échange en même temps que la carte blanche accordée aux marchés financiers sont indéniablement les piliers de la mondialisation néolibérale. Il est toujours, à ce titre, caustique d’entendre certaines et certains expliquer qu’il faut défendre cette mondialisation précisément parce qu’elle favorise la liberté de circulation des marchandises, des capitaux et même, osent-ils dire sans trembler, des humains alors même qu’il est bien connu que la libre circulation des humains est une vaste fable, tout juste assistons-nous à la libre circulation pour les ressortissants des pays du Nord, la Méditerranée transformée en sinistre cimetière est là pour en témoigner.

Se sortir du piège

Il faut reconnaitre aux défenseurs de la mondialisation néolibérale leur aisance lexicale pour détourner l’attention de la réalité. Il est effectivement probable que si leur mondialisation avait été appelée la grande dérégulation et qu’au lieu de parler de la liberté de circulation on avait parlé de carte blanche donnée aux marchés financiers, celle-ci aurait été moins acceptée et aurait donc bien moins fonctionné, ce qui tend à confirmer une nouvelle fois à quel point la bataille culturelle et linguistique est prépondérante. On le sait bien, une grande majorité de linguistes s’accordent sur le sujet, les mots ne sont pas de simples vecteurs mais participent de la structuration de notre pensée. Investir des processus néfastes pour les populations avec des affects joyeux a donc le double avantage de dissimuler les véritables objectifs et surtout de rendre compliqué la critique desdits processus.

Dans le cas présent, celui de la mondialisation néolibérale, le tour de force réussi par ses défenseurs revient précisément à nous prendre au piège de leur mondialisation. Investie de représentations positives – dans cette logique extrêmement cynique, la question de la liberté de circulation des humains est peut-être le meilleur atout puisque celle-ci est une réalité pour les ressortissants des pays du Nord – la notion de mondialisation serait incritiquable ou alors la critiquer reviendrait, toujours selon ses laudateurs, à être un affreux nationaliste favorable à l’autarcie et au repli. Il faut, je crois, prendre au sérieux ce risque parce que ces idées ont été puissamment ancré dans l’inconscient collectif tant par les éditorialistes les plus en vue, les fameux chiens de garde du pouvoir, que par une grande majorité de responsables politiques. Il est plus que temps de refaire nôtre les théories de Gramsci, de réenclencher la bataille culturelle et d’opposer à leur mondialisation, néolibérale et fondée sur le Mammon des temps modernes, la nôtre, celle fondée sur la solidarité et l’internationalisme.

Crédits photo: Le Parisien

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